- Page 52

  • A quoi va ressembler le déconfinement en cas de handicap ?

    a-quoi-va-ressembler-deconfinement-cas-handicap-12868.jpg

    " Aucune personne en situation de handicap ne se verra imposer de confinement prolongé ". Sophie Cluzel dévoile les grandes lignes du plan de déconfinement. Retour à l'école, au travail, n° de crise, dossiers en attente... Quelles perspectives ?

     

    « Aucune personne en situation de handicap ne se verra imposer de confinement prolongé », affirme le secrétariat d'Etat au Handicap dans un communiqué, levant le doute après le discours d'Emmanuel Macron du 13 avril (article en lien ci-dessous) qui avait laissé entendre que  les personnes les plus vulnérables, âgées, en situation de handicap sévère, atteintes de maladies chroniques pourraient rester confinées même après le 11 mai, « tout au moins dans un premier temps ». Dans son allocution du 28 avril, Edouard Philippe n'avait pas mentionné les personnes handicapées, les laissant dans le flou (article en lien ci-dessous). Des réponses spécifiques étaient attendues…

    Ce lundi 4 mai 2020, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (Cncph) est convoqué en visio conférence pour une « séance exceptionnelle » spécial déconfinement en présence de Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap. Au même moment, son cabinet publie l'ébauche de sa feuille de route pour cette perspective complexe. A J-7 de la délivrance, ce plan est toujours « en cours d'élaboration » mais quelques grandes lignes se dessinent…

    Refus de toute discrimination

    Le gouvernement l'affirme, son « principe d'action » refuse  toute forme de « discrimination du handicap » et il n'y aura donc pas de « règles de confinement spécifiques ». Selon Sophie Cluzel, 250 personnes seraient décédées au sein des établissements médico-sociaux et elle estime que « les personnes handicapées doivent pouvoir reprendre une vie normale ». Ce sont des « sujets de droit et non de soin », affirme la ministre. « Pour autant, se pose une exigence d'accompagnement renforcé, tenant compte d'une fragilité intrinsèque pour certaines personnes face au Covid-19 et d'une vulnérabilité contextuelle liée au confinement », modère le communiqué du secrétariat d'Etat. Ce dernier entend « accompagner le choix des personnes et des familles, notamment au travers d'une communication accessible et adaptée, d'outils d'aide à la décision ainsi que de mesures de soutien renforcées ».

    Accompagnement renforcé ?

    L'accompagnement à domicile doit être « renforcé », en particulier en appui de sorties d'hospitalisation mais également pour accompagner les personnes qui auraient des difficultés à s'approprier les gestes barrières ; le port d'un masque grand public en présence de visiteurs à domicile et lors des sorties est recommandé. Cela se fera en fonction des contraintes du territoire et selon des protocoles précis. Quant aux proches aidants, ils pourront bénéficier de « l'amplification et la diversification des solutions de répit déjà proposées ». Pour garantir la continuité des soins des personnes restant confinées, le secrétariat d'Etat travaille en lien avec le ministère de la Santé pour favoriser la reprise des soins, et accompagner les besoins spécifiques liés aux difficultés apparues avec le confinement.

    Le retour à l'école

    Les élèves en situation de handicap pourront-ils retourner à l'école, tout en bénéficiant des mesures de protection appropriées ? Oui, répond le gouvernement, sur la base du volontariat des familles. Identifiés comme « public prioritaire » par l'Education nationale, ils feront leur rentrée selon le même calendrier et la même méthode que ceux fixés par le Premier ministre. Un collectif d'AESH redoute pourtant d'être envoyé au front sans les protections nécessaires alors que l'accompagnement d'un élève handicapé exige en effet une très grande proximité (article en lien ci-dessous).

    Les externats seront également progressivement rouverts, quel que soit l'âge des enfants. Quelles priorités ? La « protection sanitaire des élèves et des professionnels » et « la poursuite de l'accompagnement à domicile ». Pour préparer les familles au déconfinement, les plateaux techniques des externats et accueils de jour pourront être mobilisés, même avant le 11 mai, à condition de respecter les mesures de protection sanitaire et d'accueillir un seul enfant ou adulte par plateau.

    Et pour les travailleurs ?

    Les travailleurs en situation de handicap dont le confinement avait conduit leur entreprise à arrêter son activité sur site, sans possibilité de télétravail, pourront reprendre le travail. Des fiches conseils métiers édités par le ministère du Travail rappelleront la nécessité d'évaluer et mettre en œuvre les adaptations et aménagements des conditions de travail nécessaires pour ce public. Mais le  télétravail « reste la modalité de travail à privilégier lorsqu'elle est possible », assure le gouvernement. Des aides existent auprès de l'Agefiph (privé) ou du Fiphfp (public), pour adapter les équipements de travail à distance.

    Les Etablissements et services d'aide par le travail (ESAT) pourront engager la reprise progressive et adaptée de leur activité même avant le 11 mai, pour permettre à la fois le renforcement de l'accompagnement des travailleurs et la relance de leur activité commerciale. Une « réflexion » est également « menée » pour la reprise des transports adaptés. Muriel Pénicaud, ministre du Travail, annonce par ailleurs que les centres de formation continue pourront de nouveau accueillir leurs stagiaires à compter du 11 mai, à condition de « respecter le protocole national de déconfinement » ; un guide ad hoc doit être publié le 5 mai.

    Poursuivre les mesures de simplification administrative

    Durant la période de confinement, des mesures visant à protéger les personnes en situation de handicap ont été prises. Toutes celles ayant des droits ou des prestations arrivant à expiration entre le 12 mars et le 31 juillet, ou arrivés à expiration avant le 12 mars mais n'ayant pas été renouvelés, voient ces derniers automatiquement prolongés de 6 mois sans aucune démarche à accomplir auprès des Maisons départementales des personnes handicapées. Après le 11 mai, des  assouplissements permettront également d'assurer la préparation de la rentrée scolaire 2020/2021, « en prévenant tout risque de rupture d'orientation ». Quant aux MDPH, vont-elles rouvrir leurs portes ? Le gouvernement promet un « accueil téléphonique renforcé et l'usage des outils de communication à distance pour les rendez-vous », en attendant un accueil physique qui se fera de manière « progressive » selon les territoires.

    Un numéro de crise

    Un numéro de téléphone pour répondre aux situations complexes d'accompagnement doit être mis en œuvre mi-mai. Ce dispositif s'inscrit dans la promesse faite par Emmanuel Macron le 11 février 2020 lors de la Conférence nationale du handicap d'un « accompagnement inconditionnel ». En 2021, des équipes d'accompagnement de proximité, mobilisées au plus près des usagers et joignables par un numéro unique sur tout le territoire, devaient voir le jour, « quand aucun des acteurs de l'accompagnement ne peut proposer seul une solution et pour éviter que ne s'installent des sur-handicaps ». Au regard du contexte de crise, ce « filet de sécurité », selon Sophie Cluzel, sera donc anticipé pour faire face aux problématiques qui vont émerger durant le déconfinement. Il s'adresse aux personnes en situation de handicap en attente de solution ou privées d'accompagnement ou de soins en raison de la crise, ainsi qu'aux proches aidants « épuisés » et enfin aux personnes handicapés ou aidants diagnostiqués positifs au Covid-19 et qui ne trouvent pas de solutions pour organiser leur prise en charge tout en protégeant leurs proches.
     
    L'ensemble de ces axes d'action seront détaillés dans les prochains jours par le secrétariat d'Etat.

  • Fauteuil roulant : des mois d'attente pour en obtenir ?

    fauteuil-roulant-mois-attente-pour-en-obtenir-12867.jpg

    Combien de temps faudra-t-il pour obtenir un fauteuil roulant? Les délivrances sont à l'arrêt depuis 2 mois, et le secteur risque d'être durablement engorgé après le déconfinement. Les prestataires de santé à domicile tirent le signal d'alarme.

     

    « Je suis en plein désarroi, dans l'attente du renouvellement de mon fauteuil roulant électrique. » Béatrice a envoyé sa demande d'entente préalable il y a plus d'un mois. Ne voyant pas revenir de réponse négative au bout de quinze jours, elle en a déduit que la transaction avait été acceptée par le service dédié de la CPAM (caisse primaire d'assurance maladie). Grave erreur ! Les services répondent aux abonnés absents et les dossiers s'amoncellent sur des bureaux restés vides depuis le début du confinement. Béatrice redoute de devoir attendre des mois encore alors que son fauteuil actuel lui joue des tours et compromet son autonomie. Le cas de cette jeune femme n'est malheureusement pas isolé. Face à l'urgence, les représentants des prestataires de santé à domicile (PSAD), qui fournissent les aides techniques et services, alertent Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap, sur des conséquences jugées « dramatiques » pour les personnes en situation de handicap… et le secteur !

    Un retard inquiétant

    25 000, c'est par exemple le nombre de fauteuils roulants qui n'auront pas été prescrits durant le confinement mais cette pénurie impacte également d'autres dispositifs. « Depuis le début de la crise sanitaire, toutes les activités d'évaluation des besoins des personnes ont été suspendues, ne permettant plus aucune prescription ni constitution de dossier de demande de prise en charge », déplore le collectif. Des équipements jugés « essentiels » qui « jouent de surcroît un rôle clef dans la diminution des risques de comorbidités induites de l'absence de mobilité (escarres, etc…) ». Le 11 mai, ce seront deux mois perdus. Comment espérer rattraper ce retard ? « Avec les contraintes administratives particulièrement lourdes et le nombre insuffisant de professionnels », les délais vont « s'allonger grandement », prévient le collectif. Ce dernier a alerté depuis plusieurs semaines déjà la CNAM  (caisse nationale d'assurance maladie) et la cellule interministérielle Covid sur les conséquences « délétères » de cette situation. Un décret pour alléger certaines contraintes est en attente de signature mais ne suffira certainement pas à faire face à une problématique qui s'annonce « catastrophique »… Le point en détails avec Sylvie Proust, administratrice de la Fédé PSAD et directrice générale de l'entreprise Harmonie médical service.

    Handicap.fr : Pourquoi les demandes d'entente préalable restent-elles lettre-morte auprès des CPAM ?
    Sylvie Proust : Une petite mise au point sur la procédure à suivre... Pour la délivrance des fauteuils électriques et des réparations, une demande d'entente préalable est nécessaire. On envoie tout le dossier à la CPAM, et la règle veut qu'à défaut de réponse sous quinze jours elle soit « positive ». C'est alors seulement que nous pouvons lancer la commande. Or nous ignorions le fait que les CPAM n'allaient soudainement plus appliquer cette règle. Courant mars, un agent de l'une d'entre elles -ils sont très peu à venir encore travailler- a pris soin de nous prévenir que les demandes n'étaient plus traitées. La règle des quinze jours ne vaut donc plus rien, tout est en suspens.

    H.fr : Quelle incidence pour vos usagers ?
    SP : De nombreuses personnes se sont retrouvées avec des fauteuils en panne non réparés ou dans l'obligation d'avancer les frais et de prendre le risque d'essuyer ensuite un refus de prise en charge. Pour les aider, nous prêtons des fauteuils à ceux qui ne disposent pas de l'accord de réparation. C'est un nouveau délai qui vient s'ajouter au délai déjà important du parcours d'acquisition d'un fauteuil, qui peut prendre de plusieurs mois à plus d'un an. Nous avons également fait des réparations mais en prenant un risque financier, pour nous et pour l'assuré, sans savoir si nous serions dédommagés.

    H.fr : Tout est au point mort depuis deux mois... Avez-vous bon espoir que les affaires reprennent avec le déconfinement annoncé du 11 mai ?
    SP : Les CPAM devraient normalement reprendre leur activité à cette date et ainsi traiter les ententes préalables. Mais, avec cet arrêt total, nous n'avons aucune visibilité en termes de délai. Le plus triste, c'est que lorsque nous avons eu connaissance de cette situation, nous avons invité la CNAM à prendre une mesure pour que cette règle de traitement des ententes préalables reste en vigueur durant le confinement. Après un avis favorable de leur part, un décret a été rédigé mais n'a toujours pas été signé. Depuis quatre semaines, c'est scandaleux !

    H.fr : Et qu'en est-il de la délivrance d'un certificat de validation ? A l'arrêt aussi ?
    SP : C'est un autre sujet très inquiétant… Dans le parcours d'acquisition d'un fauteuil roulant électrique, une étape concerne la délivrance de ce certificat par une équipe pluridisciplinaire et un médecin de rééducation fonctionnelle. Le parcours était déjà compliqué parce car les délais pour obtenir un rendez-vous sont très longs. Certaines régions sont même dépourvues de médecin qui acceptent de faire ces validations. Ce goulot d'étranglement était déjà un vrai sujet de préoccupation avant la crise. Or, avec le confinement, tous les rendez-vous ont été annulés, parce que nous ne sommes plus en mesure d'aller dans les centres ni de rencontrer les patients. Certains étaient planifiés depuis des mois et il va falloir maintenant trouver d'autres créneaux. Mais dans combien de temps, sachant qu'ils viendront s'ajouter à ceux des nouveaux patients ? Les délais d'attribution de fauteuils seront probablement allongés de six mois. A ce titre, il nous paraît donc urgent d'obtenir la suppression de ce certificat de validation.

    H.fr : Avez-vous obtenu une réponse à ce sujet ?
    SP : Aucune. Notre leitmotiv : dans beaucoup de cas, ces parcours d'acquisition ont été fait en amont, avec l'accompagnement d'un ergothérapeute (libéral ou rallié à un centre de rééducation) et d'une équipe pluridisciplinaire qui pourrait permettre de se dispenser de ce certificat. On ne part pas de rien ! En plus, nous venons d'apprendre que certains centres de rééducation, notamment hospitaliers, qui permettaient, via une consultation de jour, de délivrer ces certificats de validation, sont en train de se repositionner pour accueillir des patients post-covid. Ils ne reprendront donc certainement pas leur activité de validation avant la rentrée de septembre.

    H.fr : Vous réclamez également une délégation de prescription aux ergothérapeutes et kinésithérapeutes, quel est l'objectif ?
    SP : Jusqu'à maintenant, les médecins généralistes ou spécialistes rédigeaient ces prescriptions notamment pour l'achat d'un fauteuil roulant mais, très souvent, sur les recommandations d'un ergothérapeute. Nous souhaitons supprimer cette étape, encore une fois pour raccourcir les délais d'attribution. Je ne pense pas que l'on obtiendra cette mesure mais notre ambition est de poser des jalons. Cette revendication est accentuée par la crise mais vaut aussi en temps normal.

    H.fr : Quels sont les retours des usagers ?
    SP : Les personnes qui sont dans l'attente d'un renouvellement de fauteuil en cas de problème technique ou d'inadaptation aux besoins peuvent éventuellement utiliser leur ancien fauteuil. Les situations les plus compliquées restent pour les premières acquisitions (patients paraplégiques ou atteints de maladies neuromusculaires...).

    H.fr : Avez-vous également reçu des demandes de patients touchés par le covid-19, dans une situation de très grande fragilité, qui ont besoin de matériel adapté ?
    SP : En effet, depuis deux semaines, nous sommes sollicités pour équiper des patients en post-covid mais avec des produits moins techniques que le fauteuil roulant. Leur profil : des personnes plutôt âgées, très affaiblies, avec des besoins de prévention d'escarres ou d'aide à la marche. Pendant la crise, nous avons été très sollicités à ce sujet, à la fois parce que les patients étaient dans un état très dégradé mais aussi à cause de défauts de soin ou de nursing.

    H.fr : Avez-vous dû faire face à des difficultés pour assurer la continuité de votre activité ?
    SP : En ce qui concerne Harmonie médical service, nous avons maintenu une activité sur tous nos sites, avec une équipe minimum pour assurer le dépannage et le service après-vente de nos clients. Mais ce n'est peut-être pas représentatif de la majorité des entreprises du secteur. Les petits indépendants qui exerçaient exclusivement dans le domaine du handicap ont dû mettre tous leurs salariés au chômage technique. Ce sont eux, déjà fragilisés, qui vont le plus souffrir. De même, tous nos conseillers chargés de concrétiser les aides techniques des personnes handicapées sont en chômage durant le confinement. Après deux mois sans vente, les PSAD qui délivrent les fauteuils roulants sont économiquement anéantis. Nous n'avons même pas pu livrer le matériel que nous avions reçu soit parce que beaucoup de patients refusaient de nous ouvrir leur porte par peur d'être contaminés, et on peut le comprendre, soit parce que les centres de rééducation avaient fermé. Cette situation économique extrêmement difficile va se poursuivre à la reprise à cause d'une inertie au démarrage qu'on ne maîtrise pas.  

    H.fr : Des craintes pour l'avenir ?
    SP : Nous devons faire face à une grande inconnue, la façon dont tout le système de prise en charge autour du patient handicapé va se réamorcer. Car il est clair que tout ne se remettra pas à fonctionner comme auparavant. Nous allons être obligés de réglementer l'accès au service, le nombre de patients traités et le nombre de personnes qui pourront être accompagnées dans l'acquisition d'un fauteuil par exemple... Dans cette crise, on a complétement abandonné les personnes handicapées.

  • Pandémie et handicap: l'Onu dénonce des situations horribles

    pandemie-handicap-onu-denonce-situations-horribles-12866.jpg

    L'ONU mentionne des " rapports horribles faisant état de négligence pendant la pandémie " envers les personnes handicapées à travers le monde. Elle exhorte les Etats à prendre des mesures ciblées pour faire face à des risques " disproportionnés ".

     

    Dans le monde, plus d'un milliard de personnes (environ 15 % de la population) vivent avec une forme de handicap. Handicap international avertit que cette la pandémie de Covid-19 s'étend dans 175 pays et territoires, pour certains déjà affectés par la pauvreté, les conflits ou les catastrophes naturelles. Dans ce contexte critique, l'Onu exhorte à nouveau, le 30 avril, ses Etats à prendre des mesures pour « faire face aux risques disproportionnés auxquels sont exposées les personnes handicapées ». Redoutant des « ravages », son Haut-Commissariat aux droits de l'Homme (HCDH) a publié une note pour rappeler aux dirigeants du monde entier que les droits fondamentaux de ce public devaient être respectés.

    Des rapports horribles

    C'est avant tout le confinement qui est pointé du doigt car les personnes handicapées seraient « en danger à leur domicile, où l'accès aux aides et services quotidiens peut être limité ». « Et certaines peuvent souffrir grandement d'être isolées ou confinées », a déclaré la Haut-Commissaire Michelle Bachelet dans un communiqué. Même inquiétude dans les institutions où, selon elle, elles sont « encore plus menacées » car ces « établissements de soins auraient enregistré des taux de mortalité élevés à la suite du Covid-19 ». Elle mentionne des « rapports horribles faisant état de négligence pendant la pandémie ». L'ONG Human Rights Watch décrit, par exemple, des  traitements abusifs et des mauvaises conditions de vie dans des institutions privées et publiques du Brésil, de Croatie, du Kazakhstan, d'Inde, de Russie et de Serbie. Des dizaines de milliers d'autres personnes sont même enchaînées ou enfermées dans des établissements religieux ou publics au Ghana, en Indonésie, au Nigeria ou au Somaliland.

    L'Europe alerte aussi

    L'Onu avait tiré le signal d'alarme dès le 17 mars via la voix de Catalina Devandas, sa rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, qui jugeait que « peu avait été fait pour fournir à ce groupe à haut risque les conseils et le soutien nécessaires pour le protéger ». « Les mesures de confinement, telles que l'éloignement social et l'auto-isolement, peuvent être impossibles pour ceux qui comptent sur le soutien des autres pour manger, s'habiller et se baigner. », avait-elle ajouté. Une question de « survie », selon elle. La commission des droits de l'Homme du Conseil de l'Europe a plaidé en écho, rappelant aux Etats membres qu'une « forte proportion de leurs citoyens vivant avec un handicap » sont « exposés à un risque accru de complications médicales graves » et ont des « besoins particuliers ».

    Une vie à moindre valeur ?

    Pour les services de Mme Bachelet, le moment est donc venu de soutenir les dispositifs communautaires, dans la mesure du possible. Elle rappelle que « ces problèmes ne sont pas insolubles » mais exigent surtout que « des mesures spécifiques soient prises ou que des exceptions soient faites pour éviter que d'autres préjudices ne soient causés ». Elle évoque également la discrimination dont ces populations pourraient être victimes dans l'accès aux soins, se disant « profondément troublée par les informations selon lesquelles la vie des personnes handicapées pourrait, d'une manière ou d'une autre, avoir un poids différent de celui des autres ». La Haut-Commissaire appelle à des décisions médicales fondées sur « des évaluations cliniques individualisées et sur les besoins médicaux, et non sur l'âge ou d'autres caractéristiques comme le handicap ».

    Des informations accessibles

    Sur un autre plan, l'Onu plaide pour des informations sur le Covid-19 disponibles dans des formats accessibles aux personnes handicapées, ainsi que l'accès de l'enseignement en ligne. En admettant que certains handicaps ne les expose pas à un risque d'infection plus élevé à proprement parler, le danger peut  aussi venir de la discrimination et des obstacles qu'elles rencontrent pour avoir accès aux informations, aux services sociaux, aux soins médicaux, à l'inclusion sociale et à l'éducation.

    Si ces indications onusiennes n'ont rien de contraignant, elles ont pour objectif de donner un cap aux Etats, espérant une « prise de conscience » de l'impact de la pandémie sur ces personnes dans un contexte inédit et parfois tragique. Il s'agit aussi d'identifier des actions clés pour les États et de fournir des ressources pour approfondir les connaissances sur la manière de garantir des réponses au Covid-19 fondées sur les droits et incluant les personnes handicapées.