Clermont-Ferrand : mobilisation contre la dépendance financière des personnes en situation de handicap-Reportage de la radio France bleu Pays d'Auvergne

Une cinquantaine de personnes étaient mobilisées ce jeudi après-midi pour dénoncer le fonctionnement d'attribution de l'AAH. Cette allocation prend en compte les revenus d'un couple dans son calcul, rendant certaines personnes handicapées dépendantes financièrement de leur conjoint.

L'APF France Handicap du Puy-de-Dôme organise une fausse cérémonie de mariage pour dénoncer le fonctionnement de l'AAH
L'APF France Handicap du Puy-de-Dôme organise une fausse cérémonie de mariage pour dénoncer le fonctionnement de l'AAH © Radio France - Lou Momège

C'est un drôle de mariage qui a eu lieu ce jeudi 16 septembre, sous les arcades de la préfectures de Clermont-Ferrand. "Je le veux !", s'exclame le marié Vivien. "J'peux pas, j'ai mon AAH", retorque la mariée,  vêtue d'une robe immaculée dans son fauteuil roulant. 

Cette fausse union, mise en scène par l'APF France Handicap, tourne en dérision un problème bien réel pour les personnes en situation de handicap. Elles peuvent bénéficier de l'Allocation adulte handicapé, mais cette aide sociale est calculée en fonction des revenus du foyer. Certaines personnes se retrouvent donc dépendantes de leur conjoint, car celui-ci touche un salaire considéré comme trop élevé pour prétendre à l'AAH.

"Je suis dépendante de mon mari"

C'est le cas de Patricia, malvoyante : avec la retraite, son mari a touché une prime de départ, et elle ne peut par conséquent plus bénéficier de cette allocation. "Cette prime a entièrement supprimé mon AAH et mon ACTP. Là, je suis dépendante de mon mari, sachant qu'il a un revenu de 1.500 euros", regrette-t-elle.

Quand je veux acheter quelque chose, ou aller chez le coiffeur par exemple, je ne peux pas. Je dois demander à mon mari. Je trouve ça honteux. " - Patricia, malvoyante et ancienne bénéficiaire de l'AAH.

En France, 12 millions de personnes sont en situation de handicap.
En France, 12 millions de personnes sont en situation de handicap. © Radio France - Lou Momège

Vivre en couple ou conserver son indépendance financière. Voilà le dilemme auquel peuvent faire face les 1,22 millions de personnes bénéficiant de l'AAH (chiffre de 2019). Sandrine Raynal, la directrice de l'APF France Handicap du Puy-de-Dôme, a joué le rôle de (fausse) maire lors la cérémonie. Elle s'indigne : 

Quand une personne travaille, on lui demande pas les ressources de son ou sa conjoint(e) pour définir son salaire. L'AAH existe aujourd'hui pour compenser l'incapacité de travail des handicapés, donc on ne comprend pas pourquoi elle dépend des revenus du conjoint.

La déconjugalisation réexaminée par le Sénat

Pour Nadine Delort, élue au Conseil départemental d'APF France Handicap, cette dépendance peut engendrer des dérives : "Cela peut créer une emprise, voire des violences conjugales, car l'un est dépendant de l'autre, en plus d'être en situation de fragilité." Elle affirme que l'association fait régulièrement face à des situations de pressions psychologiques dans ce cas de figure. 

 

En juin 2021, l'Assemblée nationale avait étudié une proposition de loi pour individualiser l'attribution de l'AAH. La vaste majorité de l'hémicycle s'était prononcée en faveur de cette modification, mais le gouvernement avait finalement fait adopter par vote bloqué la création d'un abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint. La proposition de loi doit cependant reparaître devant les sénateurs le 12 octobre, et pourrait permettre, à terme, la déconjugalisation de l'AAH.

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