Assistance sexuelle : «Je veux m’éclater au lit.»

À Paris, Patricia fait régulièrement appel à des assistants sexuels. « Sauvée » par de tels services, elle pointe aussi les limites d’une activité qu’elle juge trop intellectuelle. Elle a accepté de participer à la formation que les associations CH(s)OSE et Corps Solidaires viennent de délivrer à sept nouveaux professionnels. 

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« Des papillons », « des feux d’artifice ». Depuis qu’elle a pour la première fois fait appel à une assistance sexuelle, il y a trois ans, Patricia connaît régulièrement ces sensations qui la rendent « heureuse, en confiance » et lui procurent « estime de soi ».

Souffrant d’arthrogrypose, elle ne bouge ni les bras ni les jambes, et bien que possédant une vie sociale, et une facilité à aller vers les autres, elle a fait le deuil d’une vie amoureuse. « Je ne me suis jamais fait draguer et avec mon handicap, je sais bien qu’il est inutile de croire au prince charmant. L’assistance sexuelle est pour moi le seul moyen de combler un manque affectif et charnel », confie la parisienne de 46 ans.

Pour sa première expérience, elle avait eu recours à une personne non formée, indiquée par le bouche à oreille. Puis elle avait fait appel à des travailleuses du sexe, et en 2015, elle avait aussi bénéficié d’une prestation dans le cadre d’une formation d’assistants sexuels organisée par l’association suisse Corps solidaires.

L’enjeu, selon Patricia : sauver des vies

Quand elle a appris qu’une nouvelle formation était donnée en 2016-2017, conjointement avec l’association CH(s)OSE, elle s’est à nouveau portée volontaire. La prestation, «  formidable », a eu lieu très récemment, avec une stagiaire femme, conformément à son inclinaison homosexuelle. De son parcours, de ses attentes, Patricia a également témoigné lors de la formation, devant tous les stagiaires. « Je voulais leur expliquer l’enjeu de l’assistance sexuelle : cela peut sauver des vies », explique-t-elle.

Pour elle, pouvoir identifier des professionnels dédiés et formés est nécessaire, car « les travailleurs du sexe n’y sont pas préparés, ne connaissent pas le handicap, ne sont pas habitués aux corps tordus ». Elle estime cependant que les différentes formations proposées par les associations présentent le même écueil : intellectualiser et cadrer à l’excès la pratique.

L’assistance sexuelle n’est pas un soin

« Les formateurs ont tellement peur que l’on se méprenne, en croyant au grand amour, qu’ils incitent les assistants à beaucoup verbaliser avant, pendant et après, et garder une certaine distance, regrette Patricia. Je sens qu’on les bride, alors que ce sont des personnes très libérées. Leur façon de nous parler rompt la spontanéité, et nous réduit encore une fois à des bénéficiaires de soins. C’est peut-être nécessaire pour certains, mais pas dans mon cas. Je sais très bien que ce n’est pas une relation amoureuse, mais j’ai besoin d’un lien, d’être connectée avec l’autre, sans que l’on décide de tout à l’avance. Les personnes valides ne le font pas. Je ne suis pas un objet. »

Elle qui cherche avant tout à « s’éclater au lit », en allant « jusqu’au bout » recommande, pour une prestation réussie, que l’assistant sexuel n’effectue pas le transfert du fauteuil au lit (elle le demande à son auxiliaire de vie juste avant), mais qu’il/elle se charge de la déshabiller, partie intégrante du plaisir procuré, avant que son auxiliaire de vie ne revienne la rhabiller. Des conditions qui participent également de sa dignité.

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