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  • Handicap : le monde d'après, c'est maintenant !

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    A quoi pourrait ressembler ce monde d'après, que tant appellent de leurs vœux, pour les personnes handicapées ? Contribution, tribune, prise de parole réclament une mobilisation pour ne pas perdre les acquis et incitent à faire preuve d'imagination...

     

    Alors que le président de la République a annoncé une « refondation » de la société, les prises de paroles sur le « monde d'après » se multiplient. Un vœu pieu, une illusion ? Comment deux mois singuliers pourraient suffire à chambouler un système bien ancré et nous permettre de bâtir un monde meilleur ? Certains semblent pourtant y croire, notamment dans le champ du handicap, qui profitent de l'occasion pour dresser un bilan et porter plus fort encore leurs revendications à l'aube de cet « après » que certains jugent « sombre », percuté par une crise sociale et économique d'une ampleur inégalée. Entre espérances et réalités, et même s'il fait consensus sur le papier, il va se construire sur un champ de bataille, chaque « niche » défendant ses propres intérêts. Alors, pressentant un danger imminent pour un public souvent délaissé, les acteurs du champ du handicap multiplient les professions de foi, les tribunes, les appels à contribution et les coups de gueule… Pour ne pas être englouti par ce maelstrom.

    Une tribune pour éviter l'oubli

    Le 1er juin 2020, plus d'une centaine de personnalités signent une tribune dans Le Figaro, à l'initiative de l'Association pour la prise en compte des personnes handicapées dans les politiques publiques (APHPP). Son credo : « Inspirons-nous des personnes en situation de handicap ! ». Ce collectif de citoyens, scientifiques, artistes et politiques appellent à se tourner davantage vers celles « dont la résilience », qui les rend « plus fortes dans l'adversité », est « un exemple à prendre en compte ». Et de déplorer que le lien ait été fait presque systématiquement entre handicap et « vulnérabilité ». Elle dénonce un « regard tantôt condescendant, tantôt apitoyé ».

    Dans ces circonstances inédites, « alors que le combat pour une société inclusive commençait à porter ses fruits », les signataires redoutent un « retour en arrière », conduisant ce public à être le premier « discriminé » et « écarté de l'emploi ». Or, selon eux, le handicap pourrait « être une chance pour notre société de demain », face aux enjeux écologiques (l'habitude de faire autant ou plus avec moins), au défi solidaire (l'expertise de 11 millions de personnes pour y répondre) et à la crise économique (nécessité de créer des emplois non délocalisables comme les services à la personne et de lancer des grands projets d'infrastructure accessibles). En conclusion, ils assurent que « le handicap peut être un des inspirateurs du monde d'après ! ».

    Une société plus responsable et solidaire

    Une semaine plus tôt, le 24 mai, 60 personnalités ont pris la parole dans Le Parisien, à l'invitation de l'Unapei (association de personnes avec un handicap mental), avec l'objectif de mettre en lumière les professionnels du médico-social, ces « oubliés et invisibles » (article en lien ci-dessous). Cette tribune dans un media national à très forte audience témoigne, dans un contexte incertain, de la nécessité de se rappeler aux bons souvenirs des pouvoirs publics et du grand public. Elle conclut « à l'heure où, pour beaucoup de personnes en situation de handicap et de familles, le confinement a été et reste une épreuve, ne tournons pas trop rapidement la page et réfléchissons à comment, ensemble, œuvrer à une société plus responsable et solidaire. »

    Selon APF France handicap, « cette crise sanitaire a mis à jour les limites et les insuffisances d'un certain nombre de choix politiques et économiques faits ces dernières années » et « a aussi permis à tous de mieux percevoir et comprendre ce que vivent la plupart des personnes en situation de handicap et leurs proches habituellement ». Mettant à profit cet électrochoc, elle publie 50 propositions « pour une société plus juste, apaisée et durable » qui, selon elle, « doit marquer une vraie rupture avec le monde d'avant » et offrir « l'opportunité de repenser la société ».

    L'urgence, maintenant

    Lors de ces deux mois de confinement, dans une situation inédite et parfois critique pour certaines familles, il a fallu repenser en quelques jours des organisations complexes, de longue date. Dans le médico-social, des initiatives déployées dans l'urgence pourraient-elles être consolidées à plus long terme et permettre de faire évoluer l'accompagnement des personnes handicapées ? La CNSA lance un appel à projets en ce sens afin de capitaliser ces expériences (article en lien ci-dessous). De son côté, le 2 juin, Sophie Cluzel fait, devant l'Assemblée nationale, la promotion des pratiques innovantes. 510 initiatives citoyennes ont ainsi été recueillies sur la plateforme solidaires-handicaps créée fin mars (article en lien ci-dessous), et la secrétaire d'Etat affirme que 98 % vont perdurer. Leitmotiv : « Cette période inédite et douloureuse, qui exacerbe les situations de handicap, sera aussi un accélérateur de nouvelles solidarités ». Un futur plus radieux, donc, en gestation ? Mais, pour de nombreuses personnes en situation de handicap, d'instabilité et de précarité, le monde d'après, c'est maintenant.

     

  • PCH: durant la crise, heures non réalisées mais facturées

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    Karyne a dû régler, via sa PCH, des prestations d'auxiliaires de vie non réalisées. Ce dispositif permet aux Saad de faire face à la baisse de recettes durant la crise. Epuisée, cette maman comptait pourtant reporter ces heures les mois suivants...

     

    Le courrier qu'a reçu Karyne Benharouch, maman d'une petite fille en situation de handicap, est sans équivoque : « La réglementation relative au Covid 19 permet au service d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) de facturer les interventions planifiées pour le mois d'avril »… même si elles n'ont pas été réalisées ! Signé : le conseil départemental des Bouches-du-Rhône. Elle donc régler ces heures via sa PCH (prestation de compensation du handicap) même si l'une de ses deux auxiliaires de vie, malade, ne s'est jamais rendue à son domicile.

    Etat d'urgence

    En effet, dans le cadre de la crise du Covid-19, l'ordonnance n°2020-313 du 25 mars 2020 prévoit un mécanisme de compensation financière en cas de sous-activité ou de fermeture temporaire d'un ESMS (établissements et services médico-sociaux). Ainsi, « pour la part du financement qui ne relève pas d'une dotation ou d'un forfait global (qui sont maintenus quoi qu'il arrive), la facturation est établie à terme mensuel échu sur la base de l'activité prévisionnelle, sans tenir compte de la sous-activité ou des fermetures temporaires résultant de l'épidémie de covid-19 ». Cette mesure est en vigueur depuis le 12 mars 2020 jusqu'à la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, fixée, pour le moment, au 10 juillet 2020.  

    Un procédé malhonnête ?

    Cette mesure a pour objectif de prémunir les ESMS contre la baisse de leurs recettes. « Pour assurer une stabilité financière et ne pas mettre en péril ces services, on nous demande de nous acquitter de ces heures non réalisées, s'insurge Karyne. Il est clair que ce n'est pas trop logique ». Cerise sur le gâteau, son prestataire précise, dans un autre courrier, que « pour éviter le déplacement des salariés en ces temps de confinement, nous vous proposons de nous adresser les CESU (Chèque emploi service universel) » du mois suivant. Membre du collectif Handi actif France, elle juge ce procédé « malhonnête » et « fait sur le dos de nos enfants ».

    Une autre maman a, quant à elle, décidé d'interrompre les interventions par peur de la contamination sans n'avoir jamais été informée de cette disposition par son prestataire. L'assistante sociale de la Maison de l'autonomie du Morbihan lui a assuré qu'elle ne devait rien régler. Si certains bénéficiaires de la PCH encouragent à « refuser », d'autres répondent qu'ils n'ont pas eu le choix, a fortiori lorsque le Conseil départemental règle directement le prestataire. On observe donc une disparité d'application selon les départements, qui complique la tâche des usagers.

    Lissage des heures impossible

    Karyne n'aura, certes, rien à débourser puisque cette prestation est réglée via sa PCH. Mais, « pour faire face à la reprise lente et progressive du centre », et parce que l'institut médico-éducatif qui accueille sa fille a fermé et qu'elle a dû s'occuper d'elle non-stop durant huit semaines, elle comptait reporter cette enveloppe d'heures non utilisées les mois suivants, pour « souffler ». En effet, dans le cadre du chantier de la Conférence nationale du handicap et la loi Mouiller sur l'évolution de la PCH en février 2020, un nouveau texte précise que le conseil départemental n'aura plus le droit de contrôler l'utilisation de la PCH sur une période de référence inférieure à six mois (contre un mois jusqu'à maintenant), permettant aux bénéficiaires de consommer leur aide humaine comme ils l'entendent, d'un mois sur l'autre (article en lien ci-dessous). Par exemple, une personne disposant de 100 heures mensuelles pourra n'utiliser que 80 heures en janvier et reporter son solde de 20 heures sur un autre mois, dans un délai de six mois maximum. Mais les décrets d'application n'ont toujours pas été publiés…

    Un autre point délicat soulevé notamment par APF France handicap est que certains auxiliaires de vie ont pu bénéficier des dispositions relatives au chômage partiel. Dans ce cas, est-il cohérent qu'ils puissent jouer sur les deux tableaux ? S'ils sont indemnisés du fait de leur absence, pourquoi devoir, en même temps, les rémunérer via la PCH ? Lorsque le bilan sera tiré de cette crise sans précédent, ses allocataires seront-ils « remboursés » et pourront-ils, ainsi, récupérer les heures non effectuées ? L'association réitère cette demande de « lissage » sur les futurs plans d'aides…

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     Retrouvez ce mois-ci : notre campagne #MaintenantVousSavez, un focus sur notre contribution pour un "monde d'après" plus juste, apaisé et durable fondé sur les droits humains, des infos sur notre trail solidaire du 6 juin prochain... Et bien plus encore, à découvrir ici  https://bit.ly/372A3rz101983993_10163700084265707_6409007442415321088_n.png