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De nouvelles avancées pour les fonctionnaires handicapés
Portabilité des équipements, dérogation aux règles de concours, titularisation pour les apprentis... Trois décrets parus début mai 2020 offrent de nouvelles avancées pour les fonctionnaires en situation de handicap.
Trois décrets parus les 4, 5 et 13 mai 2020 apportent de nouvelles avancées pour les agents de la Fonction publique en situation de handicap (n° 2020-523 du 4 mai 2020, n° 2020-530 du 5 mai et n°2020-569 du 13 mai). L'UNSA Fonction publique s'en « félicite ». Ils sont issus respectivement des articles 91, 92 et 93 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la Fonction publique et portent sur la portabilité des équipements, la dérogation aux règles de concours, le recrutement et examens et la titularisation pour les apprentis handicapés et le soutien à la carrière. Tout comprendre en détail…
La portabilité des équipements du poste de travail
Lorsqu'un agent en situation de handicap est amené à changer de poste, muté, ou change d'administration employeuse, il peut désormais conserver les équipements qui contribuent à l'adaptation de son poste de travail. A une condition, que cette « portabilité » représente un coût inférieur à celui qui résulterait de l'adaptation du nouveau poste de travail. Ce coût est à la charge de l'administration d'accueil.
Des dérogations pour les concours et examens
Certains candidats en situation de handicap sont susceptibles de bénéficier de dérogations aux règles normales des concours, des procédures de recrutement et des examens pour leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation. Ces aides humaines et techniques ainsi que les aménagements éventuels sont accordés sur production d'un certificat médical établi par un médecin agréé moins de six mois avant les épreuves. La date limite de production de ce document ne peut être inférieure à trois semaines du début du déroulement des épreuves mais des dérogations restent possibles, « lorsque l'urgence le justifie », précise le texte.
Un bémol tout de même ! Les aides et aménagements sollicités sont à la charge de l'autorité organisatrice, à condition « qu'ils ne soient pas disproportionnés au regard des moyens, notamment matériels et humains, dont elle dispose ». Les concours et examens dont l'ouverture a été prononcée avant l'entrée en vigueur de ce présent décret, c'est-à-dire le 7 mai 2020, ne sont pas concernés par ces nouvelles dispositions.Titularisation à l'issue d'un contrat d'apprentissage
Certaines personnes en situation de handicap (relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail) qui disposent d'un contrat d'apprentissage ont la « possibilité », à l'issue, de bénéficier de leur titularisation dans la Fonction publique. Elle sera offerte dès cette année pour les apprentis en situation de handicap recherchant un emploi à partir de l'été 2020. Ce dispositif est mené à titre expérimental durant cinq ans à compter de la publication de la loi Transformation de la Fonction publique, soit jusqu'au 7 août 2024. Elle ne concerne que les apprentis du secteur public non industriel et commercial bénéficiaires de l'obligation d'emploi dans les trois versants de la Fonction publique. Une procédure stricte doit néanmoins être respectée ; le candidat doit, par exemple, adresser sa demande trois mois au moins avant le terme de son contrat à l'autorité de recrutement. Cette dernière a un mois pour lui faire une proposition correspondant aux fonctions exercées durant la période d'apprentissage. Une commission examine le dossier et décide de sélectionner le candidat… ou pas ! Ce n'est qu'à l'issue d'un entretien qu'il sera déclaré « apte ».
« L'apprentissage est un levier majeur pour l'emploi des personnes en situation de handicap, et une opportunité pour les employeurs de recruter des collaborateurs formés », insistent dans un communiqué commun les deux secrétaires d'Etat Olivier Dussopt (comptes publics) et Sophie Cluzel (handicap). Ce dispositif fera l'objet d'un bilan annuel des recrutements accomplis.
Soutenir les développements de carrières
Sous forme de dérogation jusqu'en 2025, un troisième décret met en place une procédure dérogatoire afin de favoriser l'accès des agents en situation de handicap à un corps ou cadre d'emplois de niveau supérieur, par la voie du détachement. « Les employeurs publics doivent prendre les mesures appropriées visant à leur permettre de développer un parcours professionnel exempt de discriminations et d'accéder à des postes de responsabilité », expliquent les ministres.
Par ailleurs, des référents handicap sont mis en place par les employeurs publics des trois versants. Ils seront chargés d'accompagner les agents en situation de handicap tout au long de leur carrière et de coordonner les actions menées en leur faveur par leur employeur, notamment en matière d'insertion professionnelle et de maintien dans l'emploi. -
Arrêt des rééducations : 75 % des parents ont pris le relais
Trois-quarts des parents ont pris en charge la rééducation de leur enfant en situation de handicap moteur durant le confinement. En conséquence, une charge mentale H24 et des familles isolées. Un collectif réclame une reprise des soins, et vite !
45 % des parents constatent un impact négatif du confinement sur le moral de leur enfant en situation de handicap moteur. Tristesse, mélancolie, nostalgie... En cause notamment ? Une limitation voire une suppression des interactions sociales et des activités physiques. En conséquence, 32 % des enfants présentent des troubles du comportement et 23 % des troubles du sommeil. Ces résultats sont issus de l'enquête Echo (Enfant-confinement-handicap-besoins, de 0 à 18 ans), qui a pour objectif de recenser le vécu et les difficultés des familles touchées par un handicap moteur durant le confinement (dont 44% atteints de paralysie cérébrale, 23% d'une maladie génétique ou malformative, 21% autre et 12% concernés par une pathologie neuromusculaire). 2 000 d'entre elles ont été interrogées pour sensibiliser les décideurs sur les besoins spécifiques de ce public dans ce contexte particulier. Leur préoccupation numéro 1 ? Le suivi rééducatif, largement devant le risque d'infection de l'enfant.
Préserver les capacités motrices
Leitmotiv : les pathologies telles que la paralysie cérébrale ou les maladies neuromusculaires sont à l'origine de faiblesse musculaire, troubles du tonus, difficultés du contrôle des mouvements, perturbant la posture et la mobilité des personnes touchées et provoquant ainsi des limitations pour la réalisation des activités de la vie quotidienne. Il est donc essentiel de préserver les capacités motrices par une pratique régulière de la rééducation et de prévenir l'apparition de complications telles que les déformations orthopédiques ou le déconditionnement physique. « Pour des enfants comme mon fils ayant trois séances de kiné par semaine, le confinement a été préjudiciable », déplore une maman.
Aidant : une charge mentale H24
Face à la fermeture de nombreux centres spécialisés, 75 % des parents se sont vus contraints d'assurer la rééducation, s'improvisant tour à tour kiné, ergothérapeute, orthophoniste ou encore psychomotricien. « Nous avons dû essayer de pallier aux besoins thérapeutiques de notre enfant, seuls, alors que nous ne sommes pas thérapeutes », se désolent-ils. Ainsi, plus de la moitié d'entre eux se disent « mécontents » du suivi rééducatif et médical durant cette période de crise sanitaire et regrettent « l'absence d'informations et de communications des thérapeutes ». Résultats : des familles épuisées et démunies et « une charge mentale H24 ». Autres difficultés rencontrées : sensation de limite, priorisation des besoins de l'enfant, coordination du quotidien, manque de temps, de matériel, d'espace ou encore difficultés financières. Dans ce contexte, 76 % des répondants affirment ressentir le besoin d'un soutien extérieur.
Nécessité d'une reprise rapide des soins
Un collectif composé d'associations du champ du handicap et spécialisées en rééducation pédiatrique interpelle les pouvoirs publics sur la nécessité d'une reprise « très rapide » des soins de rééducation afin de prévenir les effets indirects de cette crise sanitaire. En attendant, il propose aux familles et aux professionnels de santé une fiche conseil « pour la rééducation et la réadaptation (RR) des personnes en situation de handicap confinées et en déconfinement progressif ». Elle invite à une évaluation régulière du « bénéfice / risque » individuel pour rechercher un équilibre entre, d'une part, les risques liés à la pandémie et, d'autre part, la santé globale des personnes concernées et de leurs aidants. Plusieurs propositions : télé-rééducation ponctuelle, auto-rééducation, intervention présentielle au domicile, en libéral, en service hospitalier... Reste à évaluer l'option la moins risquée pour chaque patient.
Pour une télémédecine plus accessible
Le collectif demande également aux autorités de santé de « faciliter l'accès du télésoin » aux personnes en situation de handicap qui a permis, selon lui, dans certains cas, le maintien du dialogue à distance avec le rééducateur et le médecin prescripteur. « La prise en compte de ces développements innovants permettrait une plus grande flexibilité dans la prise en charge, tant dans le contexte actuel qu'à plus long terme », conclut-il. Vers de nouvelles approches thérapeutiques plus souples pour la vie des familles ?